Gaz de schistes - Premiers puits en sol québécois en 2011

Publié le par Greenpeace ville de Québec

Gaz Métro a déjà demandé des autorisations gouvernementales pour les brancher à son réseau

Le projet de loi promis par Québec pour encadrer l’exploitation des gaz de schistes n’a pas encore été présenté, ni même débattu, alors que de plus en plus de citoyens s’inquiètent des impacts de l’exploitation de cette source d’énergie fossile.<br />
Photo : Yan Doublet - Le Devoir
Le projet de loi promis par Québec pour encadrer l’exploitation des gaz de schistes n’a pas encore été présenté, ni même débattu, alors que de plus en plus de citoyens s’inquiètent des impacts de l’exploitation de cette source d’énergie fossile.
Le projet de loi promis par Québec pour encadrer l'exploitation des gaz de schistes n'a pas encore été présenté, ni même débattu, tandis que de plus en plus de citoyens s'inquiètent des impacts de l'exploitation de cette source d'énergie fossile. Qu'à cela ne tienne, la société albertaine Questerre Energy espère tirer profit de ses premiers puits en sol québécois d'ici la mi-2011. Gaz Métro a d'ailleurs déjà demandé des autorisations gouvernementales pour les brancher à son réseau.

«Nous sommes actuellement en négociations avec nos partenaires, parmi lesquels Gaz Métro, la société de distribution par gazoduc pour ce projet. Sous réserve des résultats finaux du programme de puits d'observation horizontal et des négociations en cours, nous prévoyons actuellement que la production de gaz pourrait commencer dès le milieu de 2011», a fait savoir hier le président et chef de la direction de Questerre Energy, Michael Binnion, par voie de communiqué.

La porte-parole de Gaz Métro, Marie-Noëlle Cano, a d'ailleurs confirmé au Devoir que les choses évoluaient rapidement. «On a eu le mandat des producteurs de préparer un projet de prolongement de réseau gazier pour les puits de Questerre, qui travaille en partenariat avec Talisman», a-t-elle expliqué. Deux puits doivent être raccordés au réseau, un à Saint-Édouard-de-Lotbinière et un à Leclercville, sur la rive sud du Saint-Laurent.

«On a proposé un tracé, on a rencontré les propriétaires [des terrains où devrait passer le gazoduc] et on a fait les démarches auprès de l'Union des producteurs agricoles. Tout avance très bien et nous sommes en attente des certificats d'autorisation du gouvernement», a-t-elle poursuivi.

Visiblement, Gaz Métro est persuadée de recevoir le feu vert pour la construction des «28 kilomètres» de gazoduc nécessaires pour connecter les puits à son réseau, qui se rend présentement jusqu'à Saint-Flavien. L'installation de ce tuyau, qui sera souterrain, devrait prendre de six à sept mois.

Le tout sera prêt pour l'été 2011, a indiqué Mme Cano. «Notre objectif est d'être prêts au moment où les producteurs seront en mesure d'exploiter leurs puits. La demande qu'on a reçue des producteurs, c'est d'être prêts vers l'été prochain.»

Ressources importantes

Gaz Métro dit ne pas avoir reçu d'autres demandes du genre pour le moment. Mais ce ne devrait être que le début pour cette filière au Québec. Car plus le temps passe, plus les entreprises d'exploration gazière actives ici font état de ressources très importantes. Le sous-sol québécois — essentiellement sur la rive sud du fleuve Saint-Laurent, entre Québec et Montréal, de part et d'autre de l'autoroute 20 — contiendrait en effet d'énormes quantités de gaz naturel. Certains évoquent des réserves récupérables de 10 000 à 25 000 milliards de pieds cubes. De quoi subvenir à la demande de la province pendant plus d'un siècle et générer des milliards en profits pour les entreprises. Preuve de l'engouement, toute cette zone est déjà sous permis d'exploration.

Fait à noter, Gaz Métro s'est faite jusqu'ici avare de détails sur le rôle qu'elle aura à jouer dans l'exploitation des gaz de schistes au Québec. Tout au plus, on a salué la possibilité de «diversifier» les approvisionnements en gaz naturel. Actuellement, tout ce qui est consommé au Québec est importé de l'Ouest canadien. En se branchant sur des puits québécois, l'entreprise pourra épargner sur les coûts de transport, a dit Mme Cano.

La plupart des entreprises impliquées dans l'exploration gazière au Québec sont quant à elles détenues par des intérêts provenant de l'extérieur de la province. Selon le Registraire des entreprises, Questerre a pignon sur rue à Calgary, en Alberta. Parmi ses administrateurs, on retrouve bien sûr des Albertains, mais aussi deux Norvégiens et un Anglais. Un seul Québécois siège à son conseil d'administration. Il s'agit d'un certain Pierre Boivin, président du Canadien de Montréal.

Pas de débat

Il est par ailleurs étonnant de voir les choses progresser aussi rapidement du côté de Questerre. Après tout, la ministre des Ressources naturelles, Nathalie Normandeau, ne doit pas déposer avant l'automne le projet loi devant encadrer l'exploitation des hydrocarbures au Québec. Qui plus est, aucun véritable débat public n'a eu lieu pour juger de l'ensemble de cette filière complexe dont on commence à peine à prendre la mesure. Enfin, aucune étude indépendante n'a permis jusqu'à présent de déterminer avec précision les impacts environnementaux de l'exploitation des gaz de schistes.

La contestation prend d'ailleurs de l'ampleur. Des regroupements ont vu le jour pour dénoncer les pratiques de certaines entreprises présentes au Québec. Et le site Internet Rue Frontenac, fondé par les lockoutés du Journal de Montréal, faisait état cette semaine de nombreux cas de citoyens inquiets ou qui se sont sentis floués par ces sociétés. Les opposants soutiennent aussi qu'en plus des risques d'émanations de gaz toxiques, il existe une menace réelle pour la qualité de l'eau.

Les partisans du développement tous azimuts de cette filière se sont pour leur part lancé dans une véritable campagne de promotion du gaz naturel made in Québec depuis quelques mois. On dit notamment que ce gaz, bien qu'il soit émetteur de gaz à effet de serre — 30 % de moins que le pétrole —, représente une source d'énergie «propre». Questerre a aussi produit une vidéo pour «expliquer» comment on remonte le gaz à la surface. Il s'agit en fait de creuser un puits à la verticale, pour ensuite poursuivre le forage à l'horizontale. On peut alors fracturer la roche avec un mélange liquide contenant du sable et «libérer» le gaz.

Tout indique que Québec est enthousiaste à l'idée de voir se développer cette industrie. En entrevue au Devoir il y a quelques semaines, la ministre Normandeau avait bien résumé la volonté ferme du gouvernement Charest de permettre l'exploitation du gaz naturel: «Il y a là pour le Québec un rendez-vous qu'il ne peut pas manquer.»

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